La journée débute par de la montée, une ascension qui devrait nous occuper une partie de la matinée.
La journée débute par de la montée, une ascension qui devrait nous occuper une partie de la matinée. Les premiers kilomètres de déroulent pour le mieux. Le soleil est au rendez-vous et nous traversons une succession de petits villages agricoles et des vergers à perte de vue. Après quelques kilomètres je me sens faible. Anormalement faible. Mes jambes me portent juste et je me vois dans l'obligation de donner deux de mes sacoches à Aline, si l'on souhaite atteindre le haut de l'arrête de cette interminable montée. Pas après pas, montée après faux plat, montée, nous atteignons cet endroit précis où la route redescend. Délivrance, sauf que... Des maux de tête et un estomac qui fait du yo-yo m'imposent un arrêt. Je n'entrerai pas dans les détails de l'étape vidange, mais à ce moment de la journée, Aline est en T-shirt et malgré mes quatre couches dont une polaire et une doudoune, j'ai froid. Planter la tente n'est pas au programme. La route de montagne que l'on emprunte n'offrant pas réellement de place pour camper. De plus, nous n'avons pas suffisamment de nourriture pour une halte prématurée. On reprend donc la route à la recherche d'eau chaude pour un thé au sucre. Le seul aliment qui ne me donne pas la nausée. Huit kilomètres plus loin, un temple bouddhiste nous attend. Je m'assieds au soleil équipé de façon à affronter l'hiver, Aline part en quête d'un peu d'eau bouillie. Sans trop de peine, elle revient avec un thermos plein, accompagnée d'un homme. Perdus au milieu des montagnes et dans un temple qui ne paie pas de mine, elle est tombée sur un couple de Taïwanais dont la femme est infirmière. De son sac, la nurse sort deux sachets thermosoudés contenant chacun un petit nombre de pilules de couleurs et de tailles diverses. Autant dire que si c'était de l'extasy, je resterais croché un bon mois. La femme ne souhaitant pas que j'avale ces pilules avec l'eau du Thermos, qu'elle estime trop chaude, elle m'apporte une bouteille d'eau en pet. Puis c'est le bal des cadeaux. Un second couple d'insulaires ayant compris la situation nous apporte du pain au fromage, du thé Oulong en bouteille, des bonbons sucrés pour nous redonner de l'énergie et des fruits de différentes variétés. Après s'être enquis une fois de plus de ma santé, de s'être inquiété de l'endroit où nous allions dormir, mes bienfaiteurs me voyant optimiste sur ma guérison, ils repartent dans une pluie de au-revoir, bon courage et bravo. On se retrouve seuls avec pour seule compagnie la musique traditionnelle chinoise que diffuse le temple. Pour moi, le temps s'est arrêté. Je me sens léger, déchargé de ce sac d'énervement, de colère et de frustration que je porte quotidiennement bien malgré moi. Le moment est unique et cette sollicitude, cette empathie que ces gens m'ont offerte à moi l'étranger me touche au plus profond. L'émotion monte et derrière mes lunettes de soleil les larmes coulent.
Â
Ce soir, Aline découvre sur notre compte Facebook un petit message de mes prodigueurs de bons soins : How about Olivier ?
Quand tu gravis une route de montagne, rappelle-toi qu'il y a des personnes qui y ont plus peiné que toi. Ne serait-ce que les ouvriers qui l'ont construite.
Central cross-island Highway. Terminé en 1956, son ouvrage prit 3 ans, 9 mois, 5 jours et coûta la vie à 225 personnes. 6'000 ouvriers s'y activèrent chaque jour de sa construction.
Article précédent     Retour au blog     Article suivant Â