Cinq mois déjà que nous avons quitté la pelouse familiale, une matinée à la robe printanière. Cent-cinquante jours que notre « jardin » s'est mué tantôt en forêts, en îles, en plages, en prairies, en parcs, en digues, en ports, en invitations et rares sont les fois où j'ai griffonné le papier pour alimenter notre blog. Il est vrai qu'Aline prend à coeur cette activité et que « l'encre » qu'elle utilise est loin d'être gaspillée. Mais les raisons de mon absence ne sont pas habillées d'une certaine galanterie. Non, loin de là  !
Partir en vacances est un acte facile. Pour la plupart des gens, elles sont méritées et donc justifiées. De plus, le fait de se vautrer dans un transat les pieds en éventail fait partie du programme d'un bon nombre d'estivaliers et devient par conséquent accepté, voire valorisé (cf. photos likées sur les réseaux sociaux). Mais qu'en est-il de celui qui prend le large, quittant une réalité pas toujours facile, abandonnant ses semblables à cette vie de labeur. Si, avec le temps, le regard critique de certains peut s'ignorer, l'introspection est elle un passage obligé. Partir avec un kayak c'est être non pas face, mais sur un miroir de plus de 361 millions de kilomètres carré, les jours sans vent. Là , les réflexions déferlent comme la houle sur une plage en mer du Nord. Invisibles, elles « s'amoncèlent », faisant parfois un vacarme de tous les diables. Faites de pourquoi, de comment, d'où et de quand, elles prennent sournoisement de l'énergie aux « navigateurs » comme le fait parfois le jusant (marée descendante).
Imperceptible ou tout au contraire implacable, elle entraîne le marin là où il ne le souhaite pas...
Imperceptible ou tout au contraire implacable, elle entraîne le marin là où il ne le souhaite pas, semant le désordre dans ses plans de navigation, l'amenant parfois dans des eaux faites de doutes et de remises en question. Entrer dans un voyage demande du temps et de l'énergie. Et peut-être que la venue des premiers cheveux blancs n'arrange rien à la question ? Mais voilà , après cinq mois d'itinérance, je me trouve enfin à ma place. Plus besoin de trouver de prétexte pour avoir un jour revêtu la parure du voyageur. Plus besoin d'excuse pour justifier cette – arrogante – itinérance auprès de ceux qui ne se satisfont plus de leur pesante sédentarité. Plus besoin de... puisqu'aujourd'hui je ne voyage plus ! Je vis de vagabondage. Et qui, doté d'un esprit sain, peut en vouloir à quelqu'un qui vit de simplicité, de rencontres bienveillantes et de sobriété ? Mais j'y pense... Que vais-je bien pouvoir faire de cette nouvelle vie qui s'offre à moi ? / OF
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