Une météo qui s’est habillée de gris. Une température un peu plus clémente que la semaine dernière, rendant au sol son état spongieux des mauvais jours. Une matinée où la grisaille étouffe les sons, retient le temps à la manière d’une mère désespérée par le départ de son enfant. La clôture du parc, maintenue par ces piquets en bois, délimite l’espace. Statu quo, le spatio-temporel tout comme les pensionnaires sont suspendus dans cette aurore entre deux saisons. Traversant le parc, il me semble être la clé qui activera la mécanique matinale, allumant ce petit manège bien huilé qu’est notre routine. La soupe du matin est servie, puis avalée. Jour de repos pour nos pensionnaires, ils ont droit à leur temps de liberté journalier pour se décrasser les pattes, renforcer les liens sociaux de la meute. Le travail ne manquant pas, nous profitons de ce moment pour effectuer quelques menues réparations. En gardiens trop confiants, peut-être abusés par l’intérêt que portent certains chiens à notre ouvrage, nous ne remarquons pas l’absence de fugitifs. Un mouvement dans un espace réservé aux murmures du vent et à la rosée du matin attire notre attention. Une queue disparaît derrière une stuga, le nombre de chiens dans l’enclos fait défaut. Un regard, quatorze chiens dans l’espace qui leur est réservé, soit quatre bêtes manquant à l’appel. Aline agit, je réfléchis. Face à la problématique nous répondons de manière différente, se basant peut-être sur nos propres expériences. Tributaires, chacun à sa manière, de cette chime qu’est le stress. Aline ouvre la traque, j’ouvre la porte du bus. Trois des quatre manquants à l’appel s'engouffrent dans ce dernier, abusés par une trop grande envie d’aller s’entraîner. Je me questionne. A quoi bon franchir l’interdit, si ce n’est pour en profiter ? Sommes-nous également des "fugitifs" trop frileux pour échapper à notre réalité ou trop aimants de ses « gardiens » qui nous emprisonnent ? De retour dans le parc, nous rendons trois des quatre trouble-fête à leur niche, relâchant le quatrième. Comme j’aime à le répéter à nos pensionnaires, je me dis pour moi-même : « Il y a un type plus malin que les autres dans cet enclos. Et je peux vous assurer qu’il marche sur deux pattes ». Le quadrupède réalise mon souhait, réitérant son évasion. La faiblesse du parc est dévoilée. Cinq grosses pierres plus tard, il est à nouveau hermétique… du moins jusqu’à la prochaine évasion.
Le musher
Le musher est la personne qui conduit un attelage et qui, généralement, en est le propriétaire. Le mot "musher" est un anglicisme du mot français "marche", ordre que les Canadiens francophones donnaient à leurs chiens au moment du départ.
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